Trois lois discriminatoires envers les personnes LGBTI ont été adoptées en Ouganda.  © AP Photo/Ben Curtis
Trois lois discriminatoires envers les personnes LGBTI ont été adoptées en Ouganda. © AP Photo/Ben Curtis

Ouganda L'Etat réprime les personnes LGBTI en adoptant une législation discriminatoire

Selon un nouveau rapport publié le 16 octobre 2014 par Amnesty International, trois lois répressives et discriminatoires adoptée au cours des 18 derniers mois en Ouganda ont entraîné une recrudescence de la répression étatique, des discriminations basées sur le genre et des violences homophobes.

Le rapport, intitulé Rule by Law – Discriminatory Legislation and Legitimized Abuses in Uganda et publié aujourd’hui à Kampala, met en évidence la manière dont trois lois récentes sont contraires aux droits humains fondamentaux, entraînent des discriminations abusives et empêchent les personnes concernées de réclamer justice.

Lois discriminatoires

«La répression en Ouganda est de plus en plus cautionnée par l’Etat à travers l’utilisation de lois ouvertement discriminatoires qui restreignent les droits garantis dans la Constitution nationale» a déclaré Sarah Jackson, Directrice adjointe pour l’Afrique de l’Est chez Amnesty International. «Le gouvernement doit maintenant agir pour réviser ces lois toxiques qui menacent le noyau dur des droits humains en Ouganda».

Le rapport d’Amnesty International documente l’impact cumulé de la loi sur la gestion de l’ordre public (Public Order Management Act, POMA), et de la loi anti pornographie (Anti Pornography Act APA). Elle étudie également la loi anti homosexualité (Anti Homosexuality Act, AHA), même si elle a été annulée depuis. Ces trois textes ont été adoptés par le Parlement ougandais et confirmées par le Président entre août 2013 et février 2014.

Liberté de réunion et d’association

Le rapport détaille la manière dont le droit à la liberté de réunion a été rogné par la loi sur la gestion de l’ordre public qui impose toute une série de restrictions aux assemblées publiques. Cette loi a permis à la police de disperser des rassemblements de groupes politiques d’opposition et à réprimer des activistes. La police fait maintenant moins usage de cette législation qui après quelques mois a développé un effet dissuasif.

«La loi sur la gestion de l’ordre public a eu un effet dévastateur sur la capacité de la société civile à organiser même les protestations les plus timides de protester contre la loi elle-même» a déclaré Sarah Jackson. «Cette loi renverse les principes de base sur lesquels se fonde la liberté de réunion. Elle impose de sévères restrictions à l’organisation de manifestations pacifiques au lieu de les faciliter.»

Les abus légitimés

Lorsque la loi anti homosexualité était en force, les personnes clairement identifiées ou simplement perçues comme lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenre ou intersexuelles (LGBTI) étaient arrêtées de manière arbitraire, même lorsqu’elles venaient se plaindre d’abus dont elles avaient été victimes. Certaines ont été battues et tripotées par les policiers ou par d’autres détenus.

Dans les jours qui ont suivi l’adoption de la loi anti pornographie, des femmes ont été harcelées par la police et une avocate a été menacée d’arrestation à cause de sa tenue vestimentaire.

Expulsions et agressions

La loi anti homosexualité a également eu pour conséquence que des personnes LGBTI se sont fait expulser de leur domicile ou ont perdu leur emploi.

Des personnes LGBTI et des femmes ont été les cibles d’agressions dans la rue à l’époque où la loi anti homosexualité était en vigueur et juste après l’adoption de la loi anti pornographie.

«La formulation vague de ces lois a entrainé une interprétation dangereuse de la part du grand public. Nombreuses sont les personnes qui ont repris ces lois à leur compte et se sont mises à rendre elle-même en agressant les femmes et les personnes LGBTI» a déclaré Jackson. «En ne clarifiant pas suffisamment ces lois, le gouvernement s’est fait le complice des abus commis».

Après que plusieurs femmes soit disant vêtues de manière indécente aient été publiquement dénudées dans la rue, la police a déclaré que la loi anti pornographie n’autorisait pas le public à déshabiller les femmes. Les autorités n’ont par contre formulé aucune déclaration pour mettre fin aux attaques homophobes.

Le gouvernement s’est engagé à réviser la loi anti pornographie mais, huit mois après son entrée en force, un processus de révision n’a toujours pas débuté.

Personne vers qui se tourner

Les victimes d’abus de la part de la population, bien trop effrayées, n’ont pas osé se plaindre à la police et sont ainsi incapables de réclamer justice.

«Dès lors que la police n’a pas enquêté sur les abus une certaine tolérance s’est installé vis à vis de l’impunité qui a été propagée par l’Etat lui-même» a déclaré Sarah Jackson.

«Même si la loi anti homosexualité a finalement été annulée, ses effets se font toujours sentir et les problèmes fondamentaux n’ont toujours pas été traités. Les personnes qui normalement prendraient publiquement la défense des autres ont été stigmatises et se taisent»

Loi anti homosexualité annulée

La Loi anti homosexualité a été annulée par la Cour constitutionnelle de l’Uganda en août 2014 parce que le Parlement l’avait adoptée sans que le quorum n’ait été atteint. Des recours contre la loi sur la pornographie et la loi sur la gestion de l’ordre public sont actuellement pendants.

Amnesty international appelle le gouvernement ougandais à retirer ces lois discriminatoires et à ne pas se rendre complice de violations des droits humains. Le gouvernement doit protéger tous les Ougandais, y compris les femmes, les personnes LGBTI et les activistes politiques contre la discrimination, le harcèlement et la violence.

Communiqué de presse publié le 16 octobre 2014, Londres, Berne .
Contact du service de presse