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Les faits:
Thomas Lubanga Dyilo est né le 29 décembre 1960 à Juba, dans le district d’Ituri de la République démocratique du Congo (RDC) Après des études supérieures à l’université de Kisangani où il obtient un diplôme de psychologie. Thomas Lubanga entre en politique fin 1999. Il est rapidement élu membre de l’Assemblée du district d’Ituri. En 2000, il crée l’Union des patriotes congolais (UPC) dont il devient le président, ainsi que ler commandant en chef de sa branche armée, les Forces patriotiques pour la libération du Congo (FPLC)
L’UPC, avant même la création des FPLC, aurait activement recruté des enfants de moins de quinze ans et les aurait soumis à un entraînement militaire. Cette pratique s’est semble-t-il systématisée avec la création des FPLC. Les enfants auraient été forcés de participer aux hostilités, notamment en devenant les gardes du corps de hauts responsables militaires du FPLC. Thomas Lubanga au vu de sa position dans le FPLC aurait été au courant de telles pratiques et les aurait même encouragées, en particulier entre septembre 2002 et le 13 août 2003, lors du conflit armé en Ituri.
L’UPC est également accusée d’avoir massacré des civils en Ituri, notamment dans la région de Bunia, chef-lieu de ce district de Province Orientale en 2002. Entre 2002 et 2003, plus de 800 civils auraient ainsi été tués par l’UPC dans la ville minière de Mongbwalu et dans les villages adjacents. Les personnes d’origine lendu auraient particulièrement été visées. L’Ituri, région riche en matières premières, a été le théâtre de violents affrontements entre différentes milices, entraînant massacres et déplacements de populations civiles.
Selon Radio Okapi, la station radiophonique de la Mission des Nations unies en RDC (MONUC), Thomas Lubanga aurait décrété que chaque famille vivant dans les zones sous son contrôle devait impérativement contribuer à l'effort de guerre en donnant soit une vache, soit de l'argent ou un enfant devant joindre les rangs des rebelles de sa milice.
En avril 2004, la République démocratique du Congo a saisi le Procureur de la Cour pénale internationale de la situation sur l'ensemble de son territoire depuis l'entrée en vigueur du Statut de Rome, le 1er juillet 2002, en vertu de l'article 14 du Statut. La RDC a ainsi déféré la situation au Procureur qui qui a ainsi été chargé de mener une enquête.
Thomas Lubanga a été arrêté le 19 mars 2005 et incarcéré à la prison de Makala, à Kinshasa.
La procédure devant la CPI :
La 1ère Chambre préliminaire de la Cour pénale internationale, concluant qu’il y avait des motifs raisonnables de croire que Lubanga a commis des crimes de guerre consistant en l’enrôlement, la conscription d’enfants de moins de quinze ans et à faire participer activement des enfants de moins de quinze ans à des hostilités, a émis un mandat d’arrêt à son encontre le 10 février 2006. Lubanga qui avait été arrêté en mars 2005 et incarcéré à Kinshasa est remis à la Cour par les autorités congolaises le 17 mars 2006 et incarcéré au centre de détention de la Cour à Scheveningen, au Pays-Bas.
Lubanga comparaît devant la Cour pour la première fois le 20 mars 2006. Le 28 août 2006, il est formellement inculpé par le Procureur de trois crimes de guerre : la conscription, l’enrôlement et l’utilisation d’enfants de moins de 15 ans dans un groupe armé, pour participer activement aux hostilités, entre juillet 2002 et décembre 2003. C’est la seule affaire devant la Cour pénale internationale qui soit uniquement menée pour des crimes liés à l’utilisation d’enfants-soldats. Ces charges, portés par le Procureur en janvier 2007 seront confirmées par la Chambre préliminaire en novembre 2008
Après divers problèmes et une suspension de procédure liée au refus du Procureur de dévoiler dans un premier temps certains éléments de preuve, le procès contre Lubanga s’ouvre finalement le 26 janvier 2009 devant la chambre de première instance I de la CPI.
Le Procureur a présenté ses éléments de preuve, cité 36 témoins dont 3 experts. Selon lui, en tant que commandant général du FPLC, Lubanga a participé à la conscription d’enfants-soldats. Certains de ses gardes du corps étaient des enfants. Suite à de multiples témoignages de violences sexuelles sur des jeunes filles par les groupes armés, le procureur a demandé à la Cour de rajouter les charges d’esclavage sexuel et de traitement cruel à celles qui pèsent déjà sur l’accusé mais cette demande a été rejetée.
Le procès s’est poursuivi et, pour la première fois dans l’histoire du droit pénal international, des victimes sont venues témoigner. 118 d’entre elles ont été autorisées à participer à la procédure, par l’intermédiaire de leurs représentants légaux, autorisés à poser des questions spécifiques aux témoins. Trois de ces victimes ont directement témoigné devant la Cour.
Un second incident a de nouveau provoqué à nouveau la suspension des audiences entre juillet et octobre 2010. La défense affirmait que les intermédiaires du procureur étaient corrompus et poussaient les témoins à produire de faux témoignages.
A la reprise du procès, la défense de Lubanga a fait ensuite citer 19 témoins à décharge qui ont déclaré que Lubanga n’était qu’un politicien de l’UPC et n’avait aucun rôle dans les FLPC. Lubanga a admis qu’il y avait des enfants soldats au sein des FLPC mais a nié avoir participé à leur conscription et leur enrôlement. Il a au contraire affiré avoir pris part de façon active au processus de démobilisation des enfants soldats.
Le 14 mars 2012, au terme d’un procès de plus de trois ans, la Chambre de première instance décide que, malgré les nombreux incidents ayant égrainé le procès, le procureur a prouvé au-delà de tout doute raisonnable que Lubanga était coupable de la conscription, l’enrôlement et l’utilisation d’enfants de moins de 15 ans dans un groupe armé pour participer activement aux hostilités, entre début septembre 2002 et le 13 août 2003.
La Cour a prononcé une peine de 14 ans d’emprisonnement le 10 juillet 2012. Thomas Lubanga a recouru contre cette décision mais n'a pas obtenu gain de cause puisque, le 1er décembre 2014, la chambre d'appel a maintenu à la majorité sa première décision.
L’affaire Lubanga a été la première dans laquelle la Cour pénale international a rendu un verdict.
Source: www.trial-ch.org