La Suisse a été appelée à traiter plusieurs affaires relevant de la justice internationale. Quatre d'entre elles sont brièvement décrites ci-dessous. Pour une liste détaillée visitez le site internet de l'association TRIAL.
Goran Grabez (Bosnie)
La procédure contre Goran Grabez qui s’est déroulée entre 1995 et 1997 a été le premier procès contre des violations du droit international humanitaire intenté devant un tribunal suisse.
Goran Grabez a accompli son service militaire en Slovénie. Il a travaillé comme chauffeur à son retour dans la région de Prijedor dans laquelle l’armée et les milices serbes ont commis de nombreuses violations du droit international humanitaire et des droits humains notamment attaquant les populations civiles musulmanes. Déportée dans des camps de concentration, notamment à Omarska, une grande partie de la population civile a été soumise à des conditions de vie terribles, à la torture et à des exécutions extrajudiciaires.
Goran Grabez a déposé une demande d’asile en Suisse en avril 2005. Il a été arrêté ne mai de la même année suite à des accusations portées contre lui d’avoir accompli des crimes de guerre dans le camp d’Omarska entre mai et août 1992.
Une procédure s’est ouverte devant un Tribunal militaire à Lausanne (compétent pour ce genre d’affaires avant l’entrée en vigueur de diverses dispositions légales consécutives à la ratification du Statut de Rome). Suite à des témoignages contradictoires, sa culpabilité n’a toutefois pas pu être établie de manière absolue. Faute de preuves suffisantes, le Tribunal a acquitté Goran Grabez le 18 avril 1997.
Fulgence Niyonteze (Rwanda)
Le procès ouvert contre Fulgence Niyonteze a été la première procédure effectuée par un tribunal non rwandais, qui ait abouti à une condamnation.
Fulgence Niyonteze, citoyen rwandais né en 1964 a été élu en automne 1992 maire de sa ville natale de Mushubati. En mai 1994 il a réuni près de 200 habitants hutus de son village dans l’objectif de les appeler à des actes de haine contre le Tutsis vivant encore dans la région. L’objectif de l’assemblée sur la montagne était de dépister les Tutsis survivants et de pousser les participants à des actes de haine contre les Tutsis. Niyonteze a appelé les présents à la réunion à tuer les Tutsis ce qui a eu pour conséquence un nombre indéterminé d’assassinats.
Après avoir commis d’autres exactions il quitte son village à l’arrivées des troupes du Front patriotique rwandais. Il quitte le Rwanda en juillet 1994 a déposé une demande d’asile en Suisse en octobre de la même année. En mai 1995 la Suisse lui accorde l’asile et il s’installe dans le canton de Fribourg avec sa famille.
Après diverses dénonciations, Fulgence Niyonteze est arrêté le 28 août 1996 et est déféré devant un Tribunal militaire alors seul compétent pour juger des crimes de guerre. Son procès s’est ouvert à Lausanne le 12 avril 1999. Il doit répondre des chefs d’accusation de meurtre, instigation et tentative de meurtre ainsi que de plusieurs crimes de guerre au sens des Conventions de Genève de 1949. Il échappe toutefois à une incrimination pour génocide qui, curieusement, ne figurait pas, à cette époque dans le droit suisse.
Condamné le 30 avril 1999 à la réclusion à perpétuité Fulgence Niyonteze a fait appel de sa condamnation. La Cour d’appel confirmera la condamnation pour crimes de guerre et fixe la sentence à 14 ans de réclusion et 15 ans d’expulsion du territoire suisse. Il a été libéré conditionnellement en décembre 2005 après avoir passé 9 ans derrière les barreaux et son expulsion du territoire suisse a été définitivement confirmée en septembre 2006 par le Tribunal fédéral
Alfred Musema (Rwanda)
Alfred Musema est né en 1949, dans la préfecture de Byumba, au Rwanda. En 1984, il a été nommé, par décret présidentiel, directeur d'une entreprise publique, l'usine à thé de Gisovu dans la préfecture de Kibuye. En cette qualité, il exerçait une autorité de jure et un contrôle de facto sur ses employés.
En 1994, Alfred Musema a joué un rôle prépondérant dans l’extermination systématique des Tutsis qui s’étaient réfugiés dans sa région. En 1994, les massacres ont fait des dizaines de milliers de morts.
Musema a dirigé et a participé à plusieurs attaques soutenus par des employés de son usine et les tristement célèbre milices Interahamwe (extrémistes hutus). Il se. trouvait, toujours parmi les meneurs, à la tête des assaillants.
Au mois de juillet 1994, face à l’avancée des troupes du Front patriotique rwandais de Paul Kagame Alfred Musema a fui le Rwanda pour la Suisse où il déposé une demande d’asile à la fin de 1994. Dénoncé par une association de défense des victimes du génocide rwandais, il a été arrêté le 11 février 1995. Il s’agissait du premier cas d’un pays étranger appliquant sa loi nationale à un présumé coupable du génocide rwandais.
En mars 1996, le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) a demandé à la Suisse de se dessaisir de la procédure menée à l’encontre de Musema pour crimes de guerre. La Suisse a agréé à cette demande et Alfred Musema a été transféré à Arusha en mai 1997 pour y être jugé.
Son procès s’est ouvert le 25 janvier 1999. Le 27 janvier 2000, la 1ère Chambre de première instance du TPIR a déclaré – à l’unanimité – Alfred Musema coupable de «génocide, d’extermination constitutive de crime contre l’humanité et de viol constitutif de crime contre l’humanité. Il a été condamné à la peine maximale prévue par le TPIR, la réclusion à vie.
Alfred Musema a fait appel de son jugement. Le 16 novembre 2001 la Chambre d’Appel du TPIR, a confirmé la peine prononcée contre lui le 9 décembre 2001, il a été transféré au Mali pour y purger sa peine.
Erwin Sperisen (Guatemala)
Double national suisse et guatémaltèque, Erwin Sperisen a occupé la fonction de conseiller municipal de Guatemala City en 2003. Le 1er août 2004, il a été nommé chef de la Police nationale civile (PNC). Durant son mandat, de nombreux crimes ont été commis.
Lui-même aurait été impliqué dans diverses exactions commises par la police et l’armée guatémaltèque dont le massacre de la « Finca Nueva Linda » en août 2004 au cours duquel 9 personnes ont été tuées et vingt-cinq autres arrêtées et soumises à des mauvais traitements. En septembre 2006 il est intervenu avec ses collègues dans la prison de « El Pavon » pour reprendre le contrôle de l’établissement que les détenus contrôlaient depuis plusieurs années. L’intervention de plus de 3000 policiers s’est terminée par l’exécution extrajudiciaire de sept prisonniers.
En 2007, suite à l’exécution par des hommes placés sous le commandement d’Erwin Sperisen de quatre policiers suspectés d’avoir assassiné des parlementaires salvadoriens il a été contraint à démissionner. Il a alors quitté le Guatemala et est venu s’installer à Genève.
En juillet 2007, suite à une dénonciation pénale déposée par plusieurs organisations dans le Canton de Soleure dont il est originaire, la justice de ce canton a transmis le dossier au Procureur général du Canton de Genève qui a laissé traîner le dossier. Un mandat d’arrêt international ayant été lancé par la justice guatémaltèque en juillet 2010, l’affaire a finalement été transmise à un juge d’instruction.
Le 31 août 2012, Erwin Sperisen a été arrêté à Genève sur ordre du Ministère public. Le juin 2014, après presque deux ans d'enquête et trois semaines d'un procès très médiatisé et émaillé d'incidents de procédure, Erwin Sperisen a été reconnu co-auteur de six assassinats et auteur direct d'un autre lors de l'opération de sécurisation de la prison de Pavon en 2006.
Il a été condamné à vie en première instance. Un recours contre cette décision a été déposé par ses avocats.
La Cour d'appel du Canton de Genève à confirmé cette condamnation le 12 mai 2015; ses avocats ont immédiatement annoncé vouloir recourir devant le Tribunal fédéral.
La réaction d'Amnesty à cette condamnation.
Plus d’informations sur Erwin Sperisen et le Guatemala sur le site de TRIAL.