- Qui sont les défenseure·s des droits humains (DDH) et que font-ils?
- Pourquoi est-il urgent de mener une campagne sur ce thème?
- Pourquoi la campagne ‘Osons le courage’?
- Qui sont les femmes défenseures des droits humains (WHRD) et que font-elles exactement?
- Qui sont les jeunes défenseure·s des droits humains et que font-ils? Pourquoi est-ce important pour Amnesty International de travailler avec eux?
- Qu’entendez-vous par «espace de plus en plus restreint pour la société civile»? Nous vivons dans un pays libre, où la liberté de la presse et la liberté de manifester sont garanties. Je n’ai pas l’impression que cette liberté soit restreinte ici en Europe ou dans le «monde occidental».
- Qu’est-ce que la Déclaration des Nations unies (ONU) sur les défenseurs des droits de l’homme et pourquoi en avons-nous besoin?
- Que devraient faire les gouvernements et les instances de décision pour soutenir les DDH?
- Quels sont les objectifs de la campagne ‘Osons le courage’?
Un·e DDH est une personne qui se mobilise, à titre individuel ou au sein d’un groupe, pour défendre et/ou promouvoir les droits humains à l’échelle locale, nationale, régionale ou internationale. Les DDH viennent de tous les horizons. Ce sont des journalistes, des avocat·e·s, des professionnel·le·s de la santé, des enseignant·e·s, des syndicalistes, des lanceuses et lanceurs d’alerte, des paysan·ne·s. Parfois, ils ont eux-mêmes été victimes ou sont proches de victimes de violations des droits humains. Ils peuvent mener leurs activités de défense des droits humains dans le cadre de leur profession ou en dehors, à titre bénévole.
Nous vivons une époque de peur, de division et de diabolisation. Partout dans le monde, des discours pernicieux opposant «nous» à «eux» sont utilisés pour jeter sur des groupes entiers la responsabilité des griefs sociaux ou politiques.
Nous assistons à une charge frontales menée par des gouvernements, des groupes armés, des entreprises et d’autres acteurs contre le droit de défendre les droits humains. En 2016, des personnes ont été tuées dans au moins 22 pays pour avoir défendu les droits humains. Des DDH ont été victimes de campagnes de diffamation dans plus de 63 pays. Dans de nombreux endroits de la planète, ils sont désignés toujours plus ouvertement comme des criminels, des indésirables, des «défenseurs des démons». Ils sont accusés d’être «antinationaux», des «agent·e·s de l’étranger», des «terroristes». Ils sont dépeints comme une menace pour la sécurité, le développement ou les valeurs traditionnelles. C’est dans ce contexte qu’Amnesty International lance une campagne mondiale appelant à reconnaître et à protéger les DDH et à leur permettre d’agir dans un environnement plus sûr.
En dépit de cet assaut mondial contre les droits humains et celles et ceux qui les défendent, certaines personnes continuent à mener des actions courageuses et inspirante contre l’injustice.
Aujourd’hui plus que jamais, nous avons besoin qu’un grand nombre de personnes se dressent courageusement contre l’injustice et contre celles et ceux qui portent atteinte aux droits humains en échange de fausses promesses de prospérité et de sécurité. Nous avons toutes et tous le pouvoir de contester les discours toxiques et de lutter contre l’injustice. C’est pourquoi nous lançons un vaste appel à soutenir le courage, à oser le courage, à protéger le courage, à défendre le courage, à être nous-même le courage. Nous voulons montrer au monde entier que la défense des droits humains est cruciale pour que nous puissions toutes et tous vivre dans un monde plus juste et plus équitable.
En 1998, la communauté internationale adoptait par consensus la Déclaration des Nations Unies sur les défenseurs des droits de l’homme et s’engageait à reconnaître leur rôle capital dans la promotion et le respect des droits humains. La Déclaration spécifie clairement que les DDH doivent bénéficier d’une protection spéciale leur permettant d’accomplir leur travail en toute sécurité. Malheureusement, près de 20 ans après son adoption, rares sont les États à avoir donné suite à leur engagement de 1998.
Avec la campagne ‘Osons le courage, nous voulons dénoncer et renverser cette tendance. Nous allons faire pression sur les instances de décisions pour que les gouvernements s’engagent à reconnaître et à protéger les DDH. Dans le monde entier, les États doivent accorder aux DDH une reconnaissance publique en tant qu’agents indispensables du changement ; ils doivent instaurer des mécanismes pour les protéger lorsqu’ils sont en danger et mettre fin à la culture de l’impunité permettant à des acteurs publics ou privés de les agresser, de les intimider et de les harceler.
4. Qui sont les femmes défenseures des droits humains (WHRD) et que font-elles exactement?
En anglais, le terme « Women human rights defenders (WHRD) » peut désigner à la fois des femmes qui défendent les droits humains (et peuvent travailler sur toutes les questions liées aux droits humains) – on parlera alors en français de «femmes défenseures des droits humains» – et des DDH (pas nécessairement des femmes) qui travaillent sur les droits des femmes ou sur une variété de sujets liés au genre.
5. Qui sont les jeunes défenseure·s des droits humains et que font-ils? Pourquoi est-ce important pour Amnesty International de travailler avec eux?
Les jeunes DDH œuvrent également à l’avancement et la protection des droits humains. Comme pour les DDH et les WHRD, il faut se garder de les considérer comme un groupe social homogène défini exclusivement par le critère d’âge. Dans les faits, les DDH présentent des profils très divers, déterminés mais nullement limités par des facteurs tels que le sexe, l’origine ethnique, l’orientation sexuelle, l’identité de genre ou son expression, le statut socioéconomique, le handicap, la nationalité, le statut migratoire, l’appartenance à un groupe autochtone ou à un groupe ethnique, religieux, linguistique. Ces identités plurielles peuvent donner lieu à de multiples formes de discrimination et d’oppression.
Les jeunes de moins de 25 ans constituent actuellement 42% de la population mondiale. Ils sont de plus en plus nombreux à assumer des fonctions dirigeantes dans leur communauté en raison des attaques et de la criminalisation dont sont constamment victimes les leaders plus âgés. Ces derniers sont souvent en détention ou sous le coup de mandats d’arrêts. Certains ont été tués. Un exemple est celui de Berta Zúñiga Cáceres, qui joue un rôle important dans sa communauté depuis l’assassinat l’an dernier de sa mère Berta Cáceres, militante de longue date pour les droits environnementaux au Honduras.
Pour Amnesty, il est indispensable de travailler avec les jeunes DDH afin que la campagne ‘Osons le courage’ reflète leurs réalités et puisse y apporter des réponses. Nous y veillerons en nous assurant que des jeunes DDH soient impliqués dès le départ dans la campagne et soient pris en compte dans la stratégie de mise en œuvre.
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Qu’entendez-vous par «espace de plus en plus restreint pour la société civile»? Nous vivons dans un pays libre, où la liberté de la presse et la liberté de manifester sont garanties. Je n’ai pas l’impression que cette liberté soit restreinte ici en Europe ou dans le «monde occidental».
Partout dans le monde, que les pays soient dits démocratiques ou pas, il devient de plus en plus dangereux pour les organisations de la société civile et les DDH de travailler sur les droits humains. Les DDH et l’espace civique dans lequel ils agissent sont pris pour cibles et attaqués au lieu d’être soutenus et protégés comme l’exige la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’homme. Convaincus que les droits humains menacent leurs intérêts, des gouvernements, des groupes armés, des entreprises et autres puissantes entités et communautés emploient toutes sortes de tactiques et de méthodes pour faire taire les DDH et les empêcher de travailler.
Le rapport d’Amnesty International: Défenseurs des droits humains menacés – Un espace de plus en plus restreint pour la société civile met en lumière l’ampleur et l’intensité des mesures prises partout dans monde pour faire taire les DDH et réduire l’espace civique dans lequel ils travaillent. Les méthodes utilisées vont des attaques personnelles (menaces, passages à tabac, homicide) à l’utilisation de la loi pour ériger en infractions leurs activités relatives aux droits humains, en passant par la surveillance, les atteintes à leurs capacités de communication et à leur droit de se réunir pacifiquement, et les restrictions de leur liberté de circulation. Au cœur de ces méthodes figurent les campagnes de diffamation et la stigmatisation visant à discréditer les DDH et leur travail. Le rapport dénonce également les violences spécifiques dont sont victimes les WHRD en plus de celles qui touchent tous les DDH : elles incluent les sévices, les menaces et le harcèlement à caractère sexuel ainsi que les campagnes de diffamation liées à leur genre.
Un exemple: le lanceur d’alerte Edward Snowden risque 30 ans de prison aux États-Unis pour avoir divulgué des informations d’un grand intérêt public.
En 2016, la Royaume Uni a adopté une loi de surveillance parmi les plus restrictive d’Europe occidentale. La «loi sur les pouvoirs de surveillance» confère au gouvernement des pouvoirs étendus en la matière – y compris le droit d’exiger d’un site internet qu’il fournisse l’historique de consultation de n’importe quel·le résidant·e du pays
7. Qu’est-ce que la Déclaration des Nations unies (ONU) sur les défenseurs des droits de l’homme et pourquoi en avons-nous besoin ?
Il y a presque vingt ans, l’Assemblée générale de l’ONU réaffirmait les principes de liberté et de justice en adoptant par consensus la Déclaration sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et protéger les droits de l'homme et les libertés fondamentales universellement reconnus.
Cette déclaration, communément appelée Déclaration sur les défenseurs des droits de l’homme, reconnaît le rôle majeur des acteurs de la société civile dans la défense des principes qui constituent le fondement des droits humains. Point essentiel, elle affirme la responsabilité des États de mettre en œuvre et de respecter l'ensemble de ses dispositions, et en particulier leur devoir de protéger les DDH des risques découlant de leur travail
8. Que devraient faire les gouvernements et les instances de décision pour soutenir les DDH ?
Pour soutenir les DDH, les gouvernements et les instances de décision doivent:
(i) reconnaître explicitement la légitimité des DDH et soutenir publiquement leur travail, en saluant leur contribution à l’avancement des droits humains et à un monde plus juste et plus équitable ;
(ii) garantir que les DDH soient réellement protégés par des mécanismes pleinement opérationnels auxquels sont alloués des ressources suffisantes ;
(iii) favoriser et soutenir les programmes destinés à garantir que les DDH disposent des compétences, des outils et de la formation nécessaires pour pouvoir accomplir leur travail dans de bonnes conditions ;
(iv) favoriser les approches participatives afin que les DDH puissent communiquer entre eux au sein de la collectivité dans laquelle ils travaillent et accéder en toute sécurité aux instances de décision à l’échelle nationale, régionale et internationale.
Notre campagne mondiale vise à renforcer l’autonomie, la sécurité et le soutien dont bénéficient les DDH ainsi que les milliers de personnes qu’ils incitent à lutter à leurs côtés contre l’injustice. Nos objectifs sont les suivants :
- Fin 2019, les DDH, et en particulier les jeunes DDH, seront plus nombreux à être mieux connectés, reconnus, outillés et en capacité de protéger leurs droits et ceux des autres êtres humains dans un environnement plus sûr et plus favorable.
- Fin 2019, les DDH actuellement menacés seront plus nombreux à être mieux protégés par les États contre les agressions, les manœuvres d’intimidation et les actes de harcèlement, ceci grâce à des lois, des réglementations et des changements dans les pratiques.