Je leur ai montré l'endroit de la forêt où ça s’était produit. Un de mes élastiques à cheveux se trouvait sur les feuilles mortes, encore remuées.Stephanie, victime de violences sexualisées
Quand je suis rentrée à la maison après l’agression, j'étais perdue. Ma mère m'a demandé si je voulais porter plainte et j'ai accepté. La police est passée chez nous – une femme et un homme. Iels ont pris soin de moi. Mais iels m'ont directement demandé de leur montrer l’endroit où l'acte avait eu lieu. Il ne s’était pas écoulé deux heures depuis les faits. Avec le recul, je me rends compte que j’étais dépassée par les événements. Je leur ai montré l'endroit de la forêt où ça s’était produit. Un de mes élastiques à cheveux se trouvait sur les feuilles mortes, encore remuées. Me retrouver là m'a bouleversée, m'a traumatisée davantage. Avec le recul, je me demande dans quelle mesure il est nécessaire de faire subir une telle épreuve à une personne victime de violence. Ce qui est certain, c’est que je n’étais pas à même de répondre à cette question sur le moment.
L'interrogatoire était très éprouvant. J'étais fatiguée et je voulais juste prendre une douche. La police a fait des efforts, mais les agent·e·s ont aussi posé des questions qui m'ont blessée. Iels m'ont demandé si j'avais crié, si je m'étais débattue. La question est certes légitime pour savoir s'il faut chercher de potentiels témoins. Mais elle implique aussi une part de responsabilité. La police essaie d'obtenir le meilleur résultat possible pour espérer arrêter l'auteur et éviter ainsi d'autres délits sexuels. Mais il faut peser le pour et le contre: que peut-on exiger des personnes concernées pour atteindre cet objectif? Jusqu'à quel point peut-on extorquer des informations au détriment de leur état de santé mentale?
Je comprends certains procédés de la police. Mais il est important que les personnes qui ont été victimes d'une injustice, qui ont vécu un traumatisme ne soient pas encore plus traumatisées par les exigences structurelles du travail d'enquête. Il faut un meilleur échange entre la police et les personnes victimes de violences; la police doit comprendre ce qui est vraiment important pour ces dernières. Je m’engage en faveur d’un droit pénal sexuel basé sur le consentement et pour une formation de base obligatoire, renforcée par des formations continues, pour la police et le personnel judiciaire sur la manière de traiter les personnes qui ont subi des violences sexuelles. Par mon activisme, je veux rendre la situation moins pénible pour les futures victimes.