© Ok Tedi Mine CMCA Review
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L’obligation de rendre des comptes

Actualisé en été 2015
Il incombe aux Etats l’obligation de respecter et de protéger les droits humains de leur population. Les Etats sont notamment tenus de veiller à ce que nul ne subisse de préjudice de la part d’un tiers, y compris d’une entreprise.

Cependant, bien souvent, les Etats ne s’occupent pas des conséquences des activités économiques sur les droits humains. Généralement, les intérêts économiques priment sur l’obligation de protéger les droits humains, et la corruption empêche bien des Etats de prendre des mesures pour protéger les droits fondamentaux de leurs citoyen·ne·s. La recherche du profit se fait au détriment des droits humains. Les victimes de préjudices dus aux activités des entreprises, souvent très pauvres, n’ont pas les moyens de porter plainte ou d’obtenir des réparations pour les torts subis.

Une réglementation qui fait défaut

A l’heure actuelle, lorsque des entreprises prennent l’engagement d’assumer leurs responsabilités en matière de droits humains, elles le font généralement sur une base volontaire, à titre individuel ou dans le cadre d’activités sectorielles. Même si le bien fondé de telles initiatives ne peut être mis en cause, il n’empêche que ce type d’engagement est insuffisant. Il ne peut se substituer à un véritable cadre normatif mondial qui régisse précisément les activités des entreprises en matière de droits humains.

Un système de régulation et d’obligation de rendre des comptes pour les entreprises doit permettre aux personnes concernées d’avoir accès aux informations relatives à l’impact des activités d’entreprises sur leur vie, de pouvoir participer activement aux processus de consultations et de décisions et d’obtenir dans les plus brefs délais des réparations en cas d’abus.

Les initiatives volontaires pour rendre des comptes

Il existe à l’heure actuelle plusieurs directives internationales non contraignantes qui régissent les activités des entreprises et des droits humains, telles que les Principes directeurs de l’OCDE pour les entreprises, le Pacte Mondial (Global Compact), le «Global Reporting Initiative», le «Business Leaders Initiative on Human Rights» (remplacé par l'«Institute for Human Rights and Business»), les Principes volontaires pour la sécurité et les droits de l’homme dans l’industrie extractive, et l’initiative mondiale des réseaux TIC (technologies de l’information). Mais leur faiblesse réside dans leur caractère volontaire

Au niveau de l’ONU, les premières démarches visant à créer un instrument homogène clarifiant la responsabilité des entreprises en matière de droits humains datent de 2003. A cette époque, la Sous-commission de l’ONU sur la promotion et la protection des droits de l’homme a approuvé les «Normes des Nations unies sur la responsabilité des entreprises en matière de droits de l’homme».

Engagement d’un Représentant spécial

Mais alors que les dispositions générales et les principes ont été acceptés par les Etats, les dispositions portant sur les obligations juridiques et sur le contrôle externe des entreprises ont été contestées. Ce projet de Normes a été rejeté par la Commission des droits de l’homme. Mais celle-ci a toutefois exigé, dans une résolution en 2005, l’engagement d’un Représentant spécial pour la question des droits de l’homme, des sociétés transnationales et autres entreprises.

C’est le professeur John Ruggie qui a été nommé et a reçu le mandat d’identifier et d’analyser de manière systématique les mécanismes existants en matière de responsabilité sociale des entreprises, ainsi que le rôle des Etats. Suite à ce mandat, qui a été prolongé en 2008 et s'est achevé en 2011, J. Ruggie a dû élaborer des recommandations précises en direction des entreprises et des gouvernements sur leurs responsabilités respectives en matière de défense des droits humains.

Cadre des directives de J. Ruggie

Le cadre défini par J. Ruggie pour l’élaboration de ses directives est construit sur trois piliers:

  • le devoir des Etats de protéger les droits humains
  • la responsabilité des entreprises de respecter les droits humains
  • la garantie de l’accès, pour les victimes, à des voies de recours efficaces, judiciaires et non judiciaires

Grâce aux travaux de J. Ruggie, la nécessité d’intégrer les droits humains comme une norme de référence dans les activités des entreprises a été reconnue à l’échelle internationale. Néanmoins, il manque encore clairement une volonté politique des Etats de mettre en œuvre les mesures nécessaires pour développer des directives précises à l’intention des entreprises, ainsi que des mécanismes de contrôle et de sanctions en cas d’abus.

Le 30 juin 2011, le Conseil des droits de l’homme des Nations unies a adopté à l’unanimité une résolution sur les entreprises et droits humains.

Travail d'Amnesty International

Amnesty International s’engage activement pour mettre fin à l’impunité des entreprises. Elle fait campagne pour que:

  • les Etats adoptent des cadres juridiques et politiques plus fermes aux niveaux national et international, afin d’obliger les entreprises à rendre des comptes lorsqu’elles bafouent les droits humains;
  • les personnes dont les droits humains ont été bafoués par les entreprises puissent recourir à la justice et obtenir réparation, que ce soit auprès de l’Etat hôte ou l’Etat d’origine (où siègent les entreprises);
  • les populations ou personnes touchées par les opérations des entreprises aient accès aux informations de façon transparente et puissent participer aux processus de décision qui affectent leurs vies.