Guantánamo sera fermé dans une année. C'est ce que le président américain Barack Obama a annoncé juste après son entrée en fonction en janvier 2009. Il a admis en novembre dernier qu'il ne serait pas en mesure de tenir sa promesse. En ce moment, 198 détenus sont toujours emprisonnés dans le camp. Une quarantaine d'entre eux sont dans l'impossibilité de rentrer dans leur pays d'origine parce qu'ils y sont menacés de torture et de graves violations des droits humains.
40 détenus ont été transférés à l'étranger depuis l'entrée en fonction d'Obama. La France, le Portugal, la Belgique et la Hongrie en ont déjà accueilli un certain nombre. D'autres États se sont déjà déclarés prêts à faire un geste dont l'Espagne, l'Irlande, la Lituanie et la Suisse. Le Conseil fédéral a annoncé en décembre que le canton de Genève s'était offert pour accueillir un détenu ouzbek.
La stigmatisation comme «terroriste» complique l'accueil dans d'autres pays. Amnesty International regrette que diverses informations douteuses sur le taux de récidive rencontré chez les ex-détenus de Guantánamo continuent à être publiées. Les autorités américaines n'ont à ce jour jamais fourni de preuve convaincante de ce qu'elles avançaient. «Dans de nombreux cas, l'accusation d'avoir rejoint des groupes terroristes après leur libération, faite à l'encontre d'anciens détenus, s'est montrée totalement infondée», a déclaré Alain Bovard, juriste à la Section suisse d'Amnesty International. «Dans la liste des récidivistes figurent notamment des ex-détenus qui se sont simplement exprimés de manière critique sur Guantánamo, y compris dans le cadre de manifestations organisées par Amnesty International.»
Parmi les détenus de Guantánamo qui pourraient être libérés se trouvent deux frères ouïghours. Après un examen minutieux de leur dossier et la visite d'une délégation suisse à Guantánamo, le Conseil fédéral a conclu que tous deux remplissaient les critères requis pour être admis à titre humanitaire dans notre pays. «Maintenant que le gouvernement jurassien a déclaré être prêt à les accueillir, nous sommes confiants et espérons que l'accueil à titre humanitaire se concrétisera», a ajouté Alain Bovard. «La Suisse, grâce au canton du Jura, peut apporter une nouvelle contribution importante pour mettre fin au calvaire de ces deux hommes. S'ils devaient être renvoyés en Chine, ils y risqueraient la prison, la torture et peut-être même la peine capitale. Les relations économiques avec la Chine ne sauraient en aucun cas l'emporter sur le respect des droits fondamentaux des deux Ouïghours.»
Les autorités chinoises, dans une lettre au Conseil fédéral, ont décrit les Ouïghours comme des terroristes rattachés au Mouvement Islamiste du Turkestan Oriental (East Turkestan Islamic Movement ETIM). «Les deux Ouïghours n'ont aucun lien avéré avec une quelconque organisation terroriste mais ont été arrêtés de manière totalement arbitraire», a expliqué Alain Bovard. «La Chine n'a à ce jour fourni aucune preuve crédible démontrant que l'ETIM ait exercé des activités terroristes. Il existe d'ailleurs des gens qui doutent de l'existence même de cette organisation.»
La répression à l'encontre des Ouïghours s'est accrue depuis 2001, la Chine utilisant le prétexte de la «guerre contre le terrorisme» pour justifier sa politique. En août 2002, les Etats-Unis ont répondu aux pressions répétées de Beijing en incorporant l'ETIM à leur liste des «organisations terroristes». Cette liste a été approuvée le 11 septembre 2002 par les Nations unies malgré les très fortes critiques des organisations de défense des droits humains.
Communiqué de presse publié le 8 janvier 2010, Berne / Lausanne.
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