Parmi les quelques 200 détenus qui sont toujours emprisonnés dans le camp de détention de Guantánamo Bay sur l'île de Cuba se trouvent sept Ouïghours, parmi lesquels les deux frères Bahtiyar et Arkin Mahnut. Le 16 décembre 2009, le Conseil fédéral avait déclaré que les deux frères auraient aussi pu venir en Suisse si un canton s'était proposé pour les accueillir. «Comme ces Ouïghours remplissent tous les critères pour une admission et comme le canton du Jura s'est maintenant déclaré prêt à ouvrir ses portes, nous espérons maintenant que le Conseil fédéral prendra rapidement une décision positive», a déclaré la conseillère aux Etats Anne Seydoux-Christe. «J'espère vraiment que le Conseil fédéral ne se laissera pas impressionner par les menaces des autorités chinoises et décidera d'une admission à titre humanitaire.»
La Chine a prétendu ces dernières semaines que les deux frères sont de dangereux terroristes qui figurent sur une liste de personnes soupçonnées de terrorisme, établie par les Nations unies. «Ces informations sont un mensonge éhonté. Les deux frères ne figurent sur aucune liste et n'ont jamais eu de liens avec un quelconque mouvement terroriste», a expliqué Elizabeth Gilson, leur avocate américaine. Elle a été choquée la semaine dernière lorsqu'elle a pris connaissance de ces accusations et a décidé de venir en Suisse pour donner aux autorités des informations de première main sur le parcours des deux hommes. «La Chine cherche apparemment à empêcher par tous les moyens la venue en Suisse de Bahtiyar et d'Arkin», a déclaré Elizabeth Gilson. «Les autorités américaines ont pourtant déjà reconnu depuis 2003 qu'elles avaient commis une grosse erreur en arrêtant les Ouïghours de manière tout à fait arbitraire. Ils attendent depuis des années la libération promise.»
Bahtiyar et Arkin Mahnut sont détenus, malgré leur innocence, depuis sept ans et demi à Guantánamo. «Après avoir passé près de deux ans en cellule d'isolement total et avoir subi un régime de détention très dur, il est normal d'avoir besoin avant toute chose d'être libéré, et ensuite de calme et d'un soutien psychologique», explique leur avocate Elizabeth Gilson. «La Suisse, qui a une grande expérience dans le traitement des victimes de torture, est donc un lieu approprié et les deux frères seraient placés ici entre de très bonnes mains», a déclaré Elizabeth Gilson.
A l'heure actuelle, environ 80 Ouïghours vivent en Suisse, la grande majorité avec un statut de réfugié. «Nous accueillerons Arkin et Bahtiyar à bras ouverts et nous les aiderons à s'intégrer rapidement», a déclaré Endili Memetkerim, président de l'Association suisse du Turkestan Oriental. «Les Ouïghours du monde entier seront reconnaissants au Conseil fédéral et au gouvernement jurassien d'avoir donné une chance aux deux frères de vivre en sécurité. En cas de retour en Chine, ils sont menacés d'être à nouveau emprisonnés, d'être torturés ou même d'être condamnés à mort.»
Lukas Labhardt, spécialiste de Guantánamo à la Section suisse d'Amnesty International, a rappelé que près de 200 détenus croupissent encore derrière les grilles du camp de détention. Une quarantaine d'entre eux sont libérables mais ne peuvent rentrer dans leur pays d'origine parce qu'ils y sont menacés de torture et d'autres graves violations des droits humains. «Il est hypocrite de dire que les Américains doivent régler seuls le problème. Guantánamo n'aurait jamais été possible sans la complicité des États européens. La Suisse a toléré les tristement célèbres vols de la CIA, d'autres pays ont mis à disposition des Etats-Unis des centres de détention secrets», a déclaré Lukas Labhardt. «L'accueil de trois détenus serait pour la Suisse une importante contribution pour réparer les erreurs du passé. Le chemin reste cependant encore long jusqu'à la fermeture de Guantánamo et jusqu'à ce que les responsables aient rendu des comptes.»
Communiqué de presse publié le 21 janvier 2010, Berne / Lausanne.
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