par Zineb Baaziz
Pourquoi voter OUI le 9 février ?
« Parce que l’homophobie est trop souvent banalisée, et que c’est important que les personnes appartenant à la communauté LGBT se sentent protégé∙e∙s. » - Lea, 23 ans.
« Parce que le respect n’est pas encore là. Il faut voter OUI pour se protéger » - Marie.
« Parce qu’il faut avoir noir sur blanc dans le code pénal les mots « discrimination basée sur l’orientation sexuelle » ! Il n’y aura plus d’interprétations possibles. » - Samra.
« Parce que la haine n’est pas une opinion ; pour avancer vers une société plus inclusive ; parce que personne ne doit être discriminé∙e sur une caractéristique de sa personne (quelle qu’elle soit) » - Jeremy.
Enjeux et contexte
« Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits » énonce la Déclaration universelle des droits de l’homme en 1948.
Cela est suffisant pour voter OUI pour un amendement de la loi allant dans le sens d’une égalité de traitement, de reconnaissance et de respect envers les personnes homosexuelles et bisexuelles.
L’initiative parlementaire déposée par Mathias Reynard vise à compléter le Code pénal afin de proscrire la discrimination basée sur l’orientation sexuelle. Il existe aujourd’hui en Suisse des dispositions qui protègent des discriminations faites sur la base de l’appartenance raciale, ethnique ou religieuse. Toutefois, nous pouvons noter un vide juridique pour ce qui est de la protection contre les discriminations en raison de l’orientation sexuelle.
La Suisse est un pays qui s’est construit sur la base du respect et de l’intégration des minorités. La votation du 9 février est donc l’occasion d’en donner la preuve encore aujourd’hui. Voter OUI permettra de protéger la vie des personnes homosexuelles et bisexuelles au quotidien sur le territoire suisse.
En effet, aujourd’hui, une personne victime d’une agression physique ou d’insultes personnelles à cause de son orientation sexuelle peut porter plainte. Mais les appels et remarques haineuse contre un groupe entier qui mènent pourtant aux attaques personnelles ne sont pas punissable par la loi. Dans nos sociétés encore très majoritairement hétéronormatives, les couples du même genre se retrouvent contraints tous les jours d’être attentifs à de simples détails de la vie quotidienne afin d’éviter les insultes et les violences, qui demeurent explicitement non punissables par la loi.
Est-il humain que certaines personnes modifient quotidiennement leur manière d’être, de se mouvoir, d’exprimer leur amour par crainte pour leurs vies ?
Un référendum contre la criminalisation de l’homophobie a été lancé sous prétexte que cela serait une atteinte à la liberté d’expression. En d’autres termes, la question de discriminer ou non les personnes homosexuelles et bisexuelles relèverait d’une liberté d’expression. Pour y répondre, je fais référence à un dicton classique : « notre liberté s’arrête là ou commence celle des autres »…
Telle est ma réponse.
Une extension de la loi, et après ?
L’occupation de l’espace public : une expression d’une prise de conscience collective ?
La dernière « marche des fiertés » qui a eu lieu à Genève en juillet 2019 a rassemblé plus de 30'000 personnes, sorties pour exprimer la fin des discriminations liées à l’orientation sexuelle. Cette occupation de l’espace public symbolise une réelle prise de conscience de l’importance de dépasser l’invisibilité des personnes qui ne se définissent pas comme hétérosexuelles. Les personnes LGBTQI+ voient en ces manifestations un moment presque safe pendant lequel elles ne ressentent pas l’obligation de se cacher. C’est une occasion d’exprimer haut et fort leur légitimité au sein de ce même espace qui est le nôtre. C’est également un message clair et publique à nos politiques qui devraient prendre en considération ces revendications pour des lois dignes d’une Suisse libre et égalitaire.
Et peut-être dans un monde plus humain, plus inclusif que celui-ci..
Cette dite « communauté » LGBTQI+ a pendant longtemps été définie comme un groupement de personnes étiquetées comme déviantes puisqu’elles se situeraient en dehors de la norme hétérosexuelle – socialement construite et transmise. En effet, cette catégorisation représente elle-même un facteur parmi d’autres qui amplifie leur exclusion encore aujourd’hui.
Je pense l’atteinte des droits et l’égalité en termes de l’orientation sexuelle en deux stades.
Dans un premier temps, il est nécessaire de passer par un stade où se mêlent revendications et sentiment communautaire pour faire face à un système qui nous exclue juridiquement, politiquement, socialement, artistiquement mais aussi sur le plan médical. Toutefois, c’est cette reconnaissance au sein d’un groupe qui motive des personnes se définissant comme homosexuelles ou bisexuelles à sortir imposer leur existence dans la rue. Ce passage me semble primordial. Ce stade va persister tant que leurs droits, leur représentation et leur légitimité n’atteint pas celle des personnes hétérosexuelles.
Le deuxième stade – idéalement - serait d’égaliser les droits de tou∙te∙s pour petit à petit, changer dans la conscience collective l’idée que la norme est hétérosexuelle. Par conséquent, les personnes ayant une orientation sexuelle autre que celle-ci seraient comme les autres, qui ne seraient pas un écart à la norme, mais qui seraient la norme, parce qu’elles sont la norme.
L’institutionnalisation de l’ouverture à d’autres formes d’orientations sexuelles est très significative dans ce combat, mais celle-ci doit être accompagnée par un changement processuel au niveau de la société. Le changement doit commencer au niveau des relations sociales et des interactions sociales de tous les jours puisque c’est ces dernières qui forment l’ordre social ; je ne demanderai pas à ma fille si elle a un prince charmant, parce qu’elle pourrait aussi avoir une princesse charmante. Je ne lui ferai pas non plus un dessin qu’avec une représentation nucléaire hétérosexuelle.
L’extension de la loi devrait également être suivie d’une extension des mentalités.